Babel

Publié le par ChatLe

ChatLe d'Or

 

Babel.jpgAprès Amours Chiennes et 21 Grammes, Alejandro Gonzalez Inarritu mettait à nouveau sa narration typique en destins croisés au service de l'excellent Babel. Le réalisateur nous entraîne au sein d'une intrigue très riche en émotions, où les envies de sourire se font rares mais qui s'avère réaliste, très humaine, et à la portée du spectateur.

En plein désert marocain, un coup de feu est tiré en direction d'un car de touristes, blessant gravement Susan, une américaine voyageant avec son mari Richard peu de temps après un drame familial. Au même endroit, deux jeunes enfants locaux se retrouvent responsables d'un évènement tragique qui les dépasse. Aux Etats-Unis, une nourrice d'origine mexicaine, en situation irrégulière, se voit contrainte de garder plus longtemps deux jeunes enfants, et décide de les emmener avec elle de l'autre côté de la frontière pour ne pas louper un mariage dans sa famille. A tokyo, une adolescente sourde ne parvient pas à passer outre la perte de sa mère. La jeune femme, de plus en plus rebelle, se cherche et se raccroche à tout ce qu'elle peut tandis que son père est recherché par la police. Toutes liées entre elles, ces histoires ont en commun le mal-être de leurs personnages, qui luttent tous pour s'en sortir dans une vie où le chaos ne prévient pas avant d'arriver...

Spécialiste de ce type de narration et de ce genre de thèmes, Inarritu parvient pourtant à se renouveler avec Babel. Abordant beaucoup de thèmes avec une extrême justesse sans trop verser dans l'apitoiement, l'oeuvre permet au spectateur de s'identifier aux personnages et à ces moments de la vie où, d'un seul coup, le sol semble se dérober sous nos pieds. Le traitement visuel apporte à l'ensemble une atmosphère aussi discrète que prenante, et même si on sait qu'on risque fort d'en sortir un peu déprimé, on reste accroché et réceptif jusqu'à l'arrivée du générique de fin.

Ceci étant dit, loin de nous l'envie de courir s'acheter une corde après le visionnage : ne cédant jamais au moindre manichéisme, Babel se sert de la douleur pour mieux faire ressortir ce qui est précieux, et donc beau. Pour qui saura lire un minimum entre les lignes, le film se révèlera d'une profondeur remarquable et fera parvenir son message. Qui plus est, l'oeuvre parvient à ses fins sans aucun bourrage de crâne mais en décrivant des situations d'une caméra experte qui, bien qu'optant pour un point de vue sans complaisance et un brin distant émotionnellement, capte à merveille les regards, les sensations (sans s'arrêter à la souffrance sur laquelle l'accent est mis), la fragilité, et la solitude.

Incarnant tout ce panel d'émotions, le casting mis en place est hors du commun : Brad Pitt est comme d'habitude parfait, ainsi que Cate Blanchett qui incarne sa femme (ils se retrouveront chez David Fincher quelques années plus tard pour Benjamin Button). L'autre aspect du segment marocain bénéficie aussi d'une interprétation impressionnante, en particulier concernant les deux enfants. Coté mexicain de l'histoire, c'est Adriana Barraza qui tire la couverture, bien soutenue par Gael Garcia Bernal en neveu un brin imprévisible. La jeune Rinko Kikuchi, enfin, incarne à la perfection l'adolescente malentendante au centre du segment japonais de l'intrigue.

Comme dans toutes les oeuvres d'Inarritu, la bande-originale discrète vient englober l'ensemble dans un climat en phase avec les émotions ressenties, et la réalisation est virtuose tout comme le travail sur les couleurs. En définitive, bien qu'un poil désincarné, Babel s'impose facilement comme une oeuvre remarquable, à ne pas manquer mais à ne pas forcément regarder un jour de déprime...

 

Babel (2006), de Alejandro Gonzalez Inarritu, avec Brad Pitt, Cate Blanchett, Adriana Barraza, Gael Garcia Bernal, Rinko Kikuchi, Koji Yakusho, Saïd Tarchani, Boubker Ait El Caid, Elle Fanning

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